Pierre Paulin

Pierre Paulin s’inscrit en 1947 au Centre d’art et de Techniques qui deviendra l’École Camondo. Il y côtoie Janine Abraham qu’il retrouvera plus tard au sein de chez l’éditeur Meubles TV et reçoit l’enseignement du décorateur Maxime Old. Il effectue également une formation en céramique dans un atelier à Vallauris puis il part à Beaune sur les traces de son grand-oncle Fredy Balthazar Stoll, contemporain de Rodin, chez qui il découvre la taille de pierre. Diplômé de Camondo en 1950, il conçoit avec l’aide de son père ses tous premiers meubles : un bureau et un siège en contreplaqué.

Sur les conseils de Old, il effectue un stage chez Marcel Gascoin au sein de son bureau d’étude l’A.R.H.E.C. Là, il découvre la production de meubles en série et surtout le design scandinave, comme celui de Nordiska Kompaniet, dans les revues qu’il peut trouver dans la bibliothèque de l’agence. Dès lors, sur les conseils de Gascoin, il traverse l’Allemagne pour rejoindre la Scandinavie avec son frère et des amis au Danemark, en Suède et en Finlande où il découvre l’architecture et le design scandinave qui aura un impact tout au long de son œuvre.

À son retour, il dessine des modèles de meubles qu’il fait réaliser par divers ateliers (Fernand Quin, Meubles TV et la Galerie MAI) et les expose à la section Foyer d’aujourd’hui au Salon des arts ménagers de 1953 où il aménage un séjour. Si son stand est remarqué par la presse – il fera même la couverture de la revue Maison Française – il ne rencontre cependant pas le succès commercial escompté et intègre, à la demande de Geneviève Pons, la Maîtrise des Galeries Lafayette en qualité de conseiller en décoration. Là, il y découvre grâce à certaines revues le design américain ; Charles et Ray Eames, Harry Bertoia ou Georges Nelson.

En 1954, André Leclerc directeur de la marque Thonet approche Pierre Paulin qui devient designer pour le fabricant. Jusqu’en 1967, il conçoit différents modèles dont certains seront présentés au Salon des artistes décorateurs comme son célèbre bureau CM 141 ou sa chaise CM131 en contreplaqué thermoformé bakelisé. Il sera, dans un premier temps, chargé de la communication, des maquettes et documents publicitaires, puis il prend la direction artistique en développant des programmes de bureaux et de sièges réservés aux marchés des collectivités.

En 1955, Pierre Paulin retrouve l’industriel Robert Vecchione – fondateur avec Jean Tricoire de la maison d’édition Meubles TV –  et dessine plusieurs modèles pour le compte de l’éditeur, notamment le fauteuil F273 dit anneau qui sera sélectionné pour la XIe Triennale de Milan.

Installé rue de Seine à Paris, Paulin entreprend d’effectuer des recherches sur le confort des assises. En 1957, avec l’appui de Thonet, il dépose un brevet sur des textiles extensibles destinés aux modèles de série qu’il élargira par la suite aux créations d’espaces d’exposition et d’architecture intérieur. Puis avec la chauffeuse CM194 et le fauteuil CM195 Thonet, il expérimente une série de sièges avec housses amovibles en tissu extensible industriel. Ces housses sont déhoussables permettant un lavage rapide et constituant un argument commercial tout trouvé.

Lors de l’Exposition Universelle de Bruxelles en 1958, il fait la rencontre décisive de Kho Liang et Harry Wagemans, respectivement directeur artistique et Président Directeur Général de la firme hollandaise Artifort. Après plusieurs échanges, il est choisi par les dirigeants de la maison -parmi les candidatures de ses confrères Joseph-André Motte, Alain Richard, Michel Mortier ou Pierre Guariche- pour intégrer Artifort en tant que designer. En 1959, il crée le modèle 560 dit Mushroom constitué d’une structure en métal intégrant une mousse préformée et recouverte d’une housse extensible amovible. La structure disparaît au profit de la forme et ce procédé atteindra son apogée avec le modèle 557 dit langue.

Les années 60 sont marquées par la reconnaissance de son travail de créateur ; il reçoit, en effet, en 1960 le prix René Gabriel. Pierre Paulin participe aux grands chantiers mis en place par la France de la Ve République. Il participe à l’aménagement de la Maison de la Radio construite par l’architecte Henry Bernard où il réalise le foyer des artistes tandis que son confrère, René-Jean Caillette a en charge le foyer de la musique. En parallèle, il consacre ses recherches sur l’aménagement d’espaces avec la réalisation des stands de Bertrand Faure, concessionnaire exclusif d’Artifort, le salon de l’automobile, l’atelier de Marc Bohan pour Dior ou la devanture du showroom Roche et Bobois. Il poursuit sa participation au Salon des arts ménagers de 1962 et de 1966 puis s’internationalise avec conception des scénographies des showrooms de la marque hollandaise dans le monde entier.

En 1968, Pierre Paulin débute sa longue collaboration avec le Mobilier National dirigé alors par Jean Coural. Avec son confrère le designer Olivier Mourgue, il réalise l’aménagement intérieur de la maison de la culture à Rennes. Mais ce sont surtout les nouveaux aménagements des salles du musée du Louvre qui révèlent toute l’ingéniosité du créateur. Sous la houlette de l’administrateur du Mobilier National et de Michel Laclotte, alors directeur du département des Peintures, Pierre Paulin avec Joseph-André Motte et André Monpoix vont prendre en charge l’ensemble de la muséographie ; architecture d’intérieur, choix des couleurs et de l’éclairage, réalisation des vitrines et sélection des œuvres. Durant quatre ans, le trio s’attelle aux aménagements de la Grande Galerie, du Salon Carrée et du pavillon de Flore. Pierre Paulin dessine également le mobilier dont la banquette de forme ronde réalisée par l’ARC (Atelier de Recherche et de Création)  La Borne qui devient comme un motif contemporain, au cœur de la Grande Galerie, dans un lieu de mémoire du passé. Il collabore de nouveau avec l’ARC à l’occasion de l’Exposition Universelle d’Osaka en 1970 où il présente pour la première fois le prototype du siège collectif Amphys et la table Élysée.

En 1971, grâce à ses relations avec Claude Pompidou, épouse du président de la République française Georges Pompidou et passionnée d’art contemporain, il se voit confier le changement de décor des appartements privés du chef de l’État. Pierre Paulin y conçoit un fumoir, le salon des tableaux, une salle à manger et un dressing en détachant une paroi souple en tissu des murs. Il dessine une gamme de mobilier en fonte d’aluminium et des luminaires à l’éclairage indirect édités par la maison Verre Lumière. 

Entre temps Pierre Paulin rencontre en 1969 Maia Wodzislawka – qui deviendra sa seconde épouse – alors à la tête d’Architectural Design. De plus en plus intéressé par le design industriel, il rejoint l’équipe en fondant l’ADSA & Partners. Ils travailleront pour plusieurs groupes tels que Citroën, Matra Simca, Saviem, Thompson…

Au début des années 80, l’Élysée et le Mobilier National font de nouveau appel à lui pour concevoir du mobilier pour les cabinets ministériels. En 1984, il dessine le bureau de François Mitterrand, président de la République. Il reçoit en 1987 le Grand Prix National de la Création Industrielle et est chargé, pour la dernière fois, par le Mobilier National de l’aménagement de la salle hypostyle du palais d’Iéna, le Conseil Économique et Social construit par l’architecte Auguste Perret en 1939.

En 1993, il quitte l’agence ADSA & Partners et se retire dans les Cévennes avec sa femme et décède en 2009.